L’œil parisien des grands magasins japonais Isetan Mitsukoshi, Asano Miyazaki nous dévoile ses derniers coups de cœur découverts sur Who’s Next.
Interview avec Thomas Brigger, Directeur de l'Education de l'Instituto Marangoni
La mode, une éducation Instituto Marangoni, the Paris School of Fashion est une école de mode, devenue une référence incontournable dans la sphère fashion, depuis sa fondation en 1935. Des professionnels passionnés orchestrent la formation qui vise à offrir aux étudiants une vraie porte d’entrée dans le monde du travail.
Les parcours proposés sont complets au niveau théorique et pratique : ils s’organisent autour de la créativité de ces jeunes talents qui doivent la cultiver le plus précieusement possible. En septembre 2019, le groupe WSN (Who’s Next et Premiere Classe) lançait l’incubateur Lab.Scene en collaboration avec l’Istituto Marangoni pour soutenir la jeune création. À cette occasion, nous avons rencontré Thomas Brigger, directeur académique de l’Istituto Marangoni depuis trois ans.Thomas Brigger, racontez-nous votre parcours ?
Je fus moi-même étudiant de l’école à Milan. Je suis donc alumnus depuis plusieurs années. J’ai suivi le cursus de stylisme pendant quatre ans jusqu’en 2004. L’école, comme elle le fait encore aujourd’hui pour ses étudiants, m’a introduit dans le système de la mode. Cela m’a permis de décrocher des postes auprès de plusieurs marques de luxe à Milan. En 2007, je suis arrivé à Paris en tant que Directeur de studio pour une marque de mode masculine importante. Après deux ans, je me suis mis en freelance, pour lancer mon entreprise produisant entre autres des costumes sur mesure. Nous n’avions pas de boutiques, pas de points de vente en ligne ; nous allions voir le client directement chez lui, au bureau ou à l’hôtel. En parallèle en 2008, j’ai commencé à enseigner le stylisme, puis en 2010, j’ai été promu responsable du programme “Fashion Design” de l’Istituto Marangoni. En 2016, on m’a proposé de prendre le poste de Directeur de l'éducation, une offre que j’ai accepté avec plaisir. Istituto Marangoni à Paris forme environ 370 étudiants chaque année grâce à ses cinquante enseignants. L’école fait partie d’un groupe maintenant présent sur plusieurs continents, sa maison mère est située à Milan. A Paris nous proposons trois différentes branches d’enseignement : ‘Fashion Design (stylisme)’, ‘Fashion Styling and Creative Direction’ et ’Fashion Business’. Nous apprenons à nos étudiants comment travailler ensemble pour faire perdurer, avancer et réinventer ce système complexe qu’est le système de la mode. Le temps avance ; ses besoins et ses opportunités aussi.
Un conseil pour ceux ou celles qui se lancent dans la création d’une marque et voudraient participer à Who’s Next pour se faire connaître ?Je dirais que pour se lancer, il faut commencer « petit » et avec humilité : il est préférable de développer sa propre spécificité et singularité d’abord et de se faire connaître pour cela, proposer du mono produit malin par exemple ou encore une collection soignée et réduite, un travail reconnaissable qui accroche les clients. J’ai toujours préféré travailler avec des gens que je connaissais ou qui m’ont été recommandés afin de sécuriser la chaîne de production et les ventes. En termes de communication, il faut vraiment avoir une identité claire et différente de celle des autres. Il s’agit aujourd’hui de créer une communauté, un réseau. Il faut fidéliser sa clientèle. À la manière d’une petite « secte », il est vital de se constituer une “fan base” loyale qui a envie de dépenser du temps et de l’argent pour la marque et ses produits.Quels sont les enjeux de votre école aujourd’hui ?L’enseignement doit être profondément lié avec le monde professionnel, afin que les étudiants qui sortent soient prêts à intégrer un bureau, un studio. Notre travail doit donc être réaliste et concret. Nous devons être garants d’une éducation de valeur à partir du moment où l’étudiant pénètre dans nos salles de cours, et bien au-delà. La mode, pour moi, doit se porter dans la rue, se vendre. Il est plus facile aujourd’hui de se créer de la visibilité avec les réseaux sociaux,et de faire circuler une image. Mais ce n’est pas seulement une image bien soignée qui fait décoller les ventes! Il faut connaître l’industrie. Chez Istituto Marangoni, nous n’imposons pas de style, nous ne voulons pas créer des clones. Nos étudiants doivent rester eux-mêmes, mais apprennent une ligne de conduite. Notre challenge, c’est que l’étudiant sorte de l’école avec une idée, des arguments et qu’il soit prêt pour le moyen et long terme.Le Who’s Next en 3 mots ?Who is next ?Parlez-nous de votre présence au Who’s Next cette année :Cette année, Istituto Marangoni a un espace sur le Who’s Next. Nous avons longuement réfléchi à la manière dont nous allions l’investir, car il est difficile et intriguant en même temps de montrer la mode comme « Culture » avec un C majuscule, d’exposer de l’esthétique et la transmettre aux jeunes. Nous voulions montrer de la pédagogie, de l’éducation sans tomber dans les clichés. Nous avons donc décidé de raconter trois histoires différentes, une nouvelle chaque jour. Nous avons dressé un parallèle avec la FIAC ou d’autres salons d’art contemporain, où les galeries changent leur accrochage tous les jours, en maintenant leur valeur de marque et leur esprit critique. Durant les trois jours du Who’s Next, nous avons présenté différents travaux d’étudiants sans donner une préférence au média. Pour faire vivre qui nous sommes et ce que nous faisons, nous avons décidé de raconter une seule histoire en trois temps en changeant à chaque fois la scénographie.Comment ne pas passer inaperçu aujourd’hui ?L’une des expressions les plus utilisées de l’année, c’est d’être transparent. Malheureusement, ce concept n’inclut pas forcément l’idée de la sincérité. Aujourd’hui, au-delà d’être transparent, il faut être sincère : avec soi-même, et par rapport à ses propres capacités et limites. Il faut être sincère avec les autres, avec tout le monde ; pas seulement avec ses supporteurs, mais surtout avec les critiques. Il faut être soi-même, tout le temps, jamais celui ou celle que les autres attendent. C’est ça qui est difficile et compliqué. Dans ce monde de la mode qui semble tellement petit, l’image s’est “aplatie” pour laisser régner un mainstream visuel. Les images policées montrent des personnes qui finalement, veulent se ressembler. C’est notre travail de trouver des jeunes avec une vraie histoire et de leur enseigner comment sortir du lot.Comment voyez-vous le futur de la mode ?Je suis tellement heureux de travailler dans l'éducation pour être proche du futur de la mode, d’essayer de le créer pour de vrai. Je suis convaincu que nous ne pouvons enseigner les challenges du futur qu’en les vivant tous les jours. On ne peut pas enseigner comment être éco-responsable, il faut le vivre comme école, comme directeur, comme enseignant et comme étudiant ! C’est le seul moyen pour vraiment faire une différence dans le futur. Parfois, je ne comprends plus la mode : trop de mots vides, trop d’images plates, pas assez de pensées profondes, plus de vraies idées. Ce qui me fait peur et qui en même temps m’encourage à faire mon travail tous les jours, ce sont les immenses clivages entre les géants et les jeunes. Le système de la mode dans lequel nous vivons actuellement est en train de creuser des écarts, qui mèneront à une révolution. Je ne dis pas que le futur sera mieux ou pire ou qu'avant c’était mieux ou pire. C’est toujours différent. Notre travail, le plus difficile à ma connaissance c’est de s’adapter.Quelles sont vos 5 pièces coup de cœur et quelles sont les tendances SS20 repérées sur Who’s Next ?J’ai repéré beaucoup de pièces hippie chic, de grandes robes fleuries, du tie & dye aussi, de l’oversize... C’est très “country” finalement, mais “country utilitarian”. Il y a aussi beaucoup de maille.Mes coups de coeur :
- Fabienne Chapot et ses robes à la Diane Von Furstenberg
- OOFWEAR, une marque italienne sportswear mais edgy
- Annie P, une marque grecque avec des imprimés de folie et exclusifs
- Tricot Chic, une marque italienne
- Art Point, une marque autrichienne, le merchandising était superbe
- GAMUT, une marque française, c’est totalement dans l’air du temps, mon gros coup de cœur
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